J’ai posé des regards et des soupirs devant cette grande fenêtre;
Ici, barricadée entre quatre murs d’un quotidien gris et froid;
Les saisons défilent et je n’en ai manqué aucune;
Du tapis blanc aux chauds étés;
J’ai vu passé le temps;
De l’éclosion des pétales à la tombée des feuilles;
Croyez-moi quand je vous dis;
Le soleil rougeâtre qui se lève, je le connais aussi bien que ces milliards d’étoiles qui brillent dans la nuit;
Les filantes sont des menteuses auxquelles j’ai cessé de croire;
Il y a bien longtemps;
J’ai cessé de voir la magie;
Il n’y a que lumière et noirceur;
Et je suis cette oscillation à peine perceptible parfaitement calqué à son environnement stérile;
L’épuisement m’a gagné, je suis désormais condamnée par la routine
Orpheline, sans famille.
J’attends des heures, cet espoir que quelqu’un me reconnaisse;
Je suis orpheline, dit-on, mais je dois venir nécessairement de quelque part;
D’un père et d’une mère;
Deux êtres qui ont voulu au moins une fois être près l’un de l’autre;
Consommer par l’amour;
D’un homme et d’une femme;
Ou quoiqu’ils fussent;
Mené par un geste de rage ou de tendresse;
Malgré tout, je suis venue.
Je m’agite devant cette fenêtre;
Espérant qu’on me retrouve;
Qu’on me découvre un lien;
Une parenté;
Un adulte pour m'accompagner;
Aux grands bassins remplis de poissons;
Aux jeux gonflables du quartier;
Aux cirques...
Regardez-moi, dis-je aux passants
Me reconnaissez-vous?
Monsieur!
Madame!
Ces traits?
Ce visage rosé?
Ce bout de nez relevé?
Ces yeux tombants, émeraudes!
Les reconnaissez-vous?
Est-ce les vôtres, dis-je aux passants?
Me reconnaissez-vous ?
Sans réponse;
Sans regard;
Le temps passe;
Les passants ignorent;
Qu’il y a ici, une fillette qui pleure;
Beaucoup moins jolie, car elle ne ressemble à personne.
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